Livraison à domicile [Nikolaï]

Avery attendit que sa collègue, Joane, arrive pour lui donner les informations sur les arrivées, les sorties, les patients qu’il fallait surveiller de près, etc… Et encore bien d’autres informations comme qui était le pédiatre de garde, qui était absent dans les membres de l’équipe. Il fallait le faire afin de passer le relais et que sa remplaçante ait toutes les données nécessaires pour veiller sur les petits malades de son mieux. Quand ce fut fait, la jeune femme se dirigea vers le vestiaire pour se changer. Après une douche rapide - histoire de chasser l’odeur typique des hôpitaux - et habillée, l’infirmière fit un petit détour en salle de repos pour saluer tout le monde mais également pour prendre son planning parce que sa chef lui avait annoncé un changement. Une fois le document en main, elle le glissa dans son sac parce qu’elle le consulterait plus tard, quand elle serait seule et à tête reposée.

Elle était pratiquement arrivée à l’escalier de service quand quelqu’un l’interpella :

- Avery attends !

- Bien sûr, répondit-elle se demandant bien ce qui se passait exactement.

Elle s’arrêta et attendit comme demandé par sa collègue qui avait pressé le pas pour lui parler manifestement. Elyze était enfin arrivée devant elle mais elle n’avait toujours pas ouvert la bouche. Autrement dit si elle ne se décidait pas à parler, elle allait rater son bus et devrait attendre le suivant dans le froid. Et de l’autre côté, elle ne se voyait pas bousculer l’autre jeune femme pour savoir ce qu’il y avait d’aussi important.

- Je voulais savoir si ça te dérangeais, si je donnais ton numéro de téléphone à l’une de mes amies pour mon enterrement de vie de jeune fille ? Lâcha-t-elle d’une seule traite.

- Elyze, bien sûr que tu peux le lui donner ! Dit-elle pour la rassurer. Dis-lui de laisser un message si elle tombe sur mon répondeur ! Elle n’ajouta pas qu’elle la rappellerait dès qu’elle aurait connaissance du message parce que ça allait de soi. Après avoir échangé quelques mots supplémentaires, les deux infirmières partir chacune de leur côté.

Comme Avery s’y était attendu son bus ne l’avait pas attendue. Enfin, il était à l’arrêt quand elle l’avait aperçue et le chauffeur lui avait fermé les portes au nez quand elle était parvenue à sa hauteur, après avoir fait un petit sprint. Et bien autant dire que la prochaine fois, elle ne prendrait pas cette peine. Bref comme elle était à l’arrêt, Avery regarda les horaires pour savoir à quelle heure le prochain serait là. Une demi-heure d’attente.

Ça devait faire dix minutes qu’elle poireautait quand elle eut une idée. Elle tourna les talons pour se rendre à la station de taxi. Direction : Shoreditch. Elle demanda au chauffeur de s’arrêter à quelques rues de sa destination. Autant ne pas arriver les mains vides. Après deux haltes, l’une pour deux pizzas et l’autre pour de la bière.

Elle finit par toquer à la porte, après avoir posée le pack de bière :

- Room service, dit-elle un peu plus fort pour que son ami russe l’entende.

Et pas à un seul moment, elle n’avait envisagé que ce dernier ne puisse pas être chez lui.

La journée à été longue, trop longue sans doute. Les dossiers s'entassaient depuis quelque jours et je n'arrivais pas à en voir le bout, à croire que tout le monde voulait divorcer en même temps. J'ai enchaîné les rendez-vous avec autant d'homme que de femme toute la mâtiné et l'après midi était réservée au tribunal ce qui n'était pas une mince affaire et mais j'adorais aller au tribunal. C'est bien pour ça que j'ai voulu devenir avocat pour pouvoir plaider des causes et être au service des autres. Je suis un peu trop à leur service en ce moment, j'en oublie presque ma vie. En fait je crois que l'oublie un peu et j'aimerais bien faire autrement mais le travail c'est tout ce que j'ai. Je n'ai pas de petite amie, pas vraiment de coup d'un soir non plus, ce n'est pas du tout mon genre les coups d'un soir et je fais trop peu confiance aux gens pour laisser entrer n'importe qui dans ma vie. J'ai le temps de repenser tout ça en rentrant chez moi. La voiture me permet de penser à autre chose qu'au travail et justement à ma vie. J'ai trente ans et je suis toujours célibataire. Trente ans et toujours pas d'enfants. Je n'ai jamais imaginé mon avenir mais là je dois dire que je commence à me demander ce que sera ma vie dans dix ans, si je serais toujours seul ou pas quoi qu'il arrive je crois que je serais toujours en Angleterre. Je ne retournerais pas en Russie c'est ici chez moi à présent.

Une fois arrivé à la maison je dépose mon cartable sur la table basse de mon petit salon et je suis allé directement me prendre une bière dans le frigo et j'ai constaté une fois de plus que le frigo était vide. Je n'ai même plus de temps pour aller faire mes courses, si ce n'est pas malheureux. Je repense à Sharona que j'ai rencontré dans un fast-food. Je pense souvent à elle en ce moment et je ne sais pas dire pourquoi, elle est plus jeune que moi. J'allais ouvrir ma bière lorsque j'ai entendu sonner à la porte. Je suis surpris, qui peut bien venir à l'improviste maintenant? Je suis allé ouvrir pour voir Avery. J'ai souris. Elle m'a beaucoup aidé quand je suis arrivé et pourtant ça aurait pu mal tourner.

« Salut sweetie. Tu tombe à pic.»

J'ai aperçus les pizza et je n'ai pu m'empêcher de me dire qu'elle avait le chic pour rendre ma vie meilleure. Je l'ai laissé entré et j'ai pris le pack que bière que j'ai posé sur la table.

« Hum, ça sent drôlement bon. Pose tes affaires et fait comme chez toi, tu seras toujours chez toi ici. »

Je lui fais un clin d’œil, elle sait qu'elle peut compter sur moi quoi qu'il arrive que jamais je ne la laisserais tomber, parce qu'elle est un peu comme ma meilleure amie, elle l'est mais elle est aussi plus que ça, sans elle je ne serais sans doute pas ici.

Avery se mordit la lèvre inférieure, se demandant soudainement si elle n’aurait pas mieux fait de téléphoner avant de venir. Non, elle n’avait pas pensé au fait qu’il se pourrait qu’il soit absent, qu’il ait un diner d’affaire, voir un rendez-vous galant. Elle pencherait plus pour la seconde solution. Il aurait vraiment fallu qu’elle soit aveugle pour ne pas avoir qu’il était beau garçon, qu’il avait de l’humour et de la conversation, surtout qu’elle adorait l’entendre jurer en russe quand il était énervé. Il avait tout pour lui et il plaisait aux femmes. L’infirmière était toujours amusée quand ils allaient diner dehors ou passaient la soirée ensemble, de voir toutes ses femmes se retourner à son passage ou à le suivre du regard, aussi bien discrètement qu’ouvertement. Si elle était honnête avec elle-même, il correspondait à ce qu’elle recherchait chez un homme. Cela dit, Niko était son meilleur ami depuis des années, elle avait l’intention que ça reste ainsi pendant de longue année. Elle espérait juste que ça ne changerait pas quand il aurait trouvé la personne avec qui partager sa vie, et qu’il en serait de même pour elle. Que leur partenaire respectif ne leur demanderait pas de choisir entre elle/lui et leur amitié. Enfin bref, actuellement la question ne se posait pas, elle verrait le moment venu seulement.

Toujours l’idée en tête qu’il ne soit pas là, Avery tendit tout de même l’oreille pour entendre s’il y avait du bruit dans l’appartement. Chose totalement idiote quand il suffisait d’attendre encore un peu pour avoir la réponse. Ceci dit, l’infirmière n’eut pas longtemps à attendre parce qu’il lui ouvrit la porte et sa réplique l’amusa beaucoup.

- Salut toi, le salua-t-elle à son tour.

Avery s’arrêta à son niveau quand il s’écarta pour qu’elle puisse entrer pour déposer un petit baiser sur sa joue. Puis elle fit comme il lui dit, c’est-à-dire de faire comme si elle était chez elle. Elle déposa les pizzas sur la table avant de retirer son manteau et de poser ses affaires dans un coin. Pendant ce temps-là, Nikolaï arrivait avec le pack de bière.

- Et elles viennent de sortir du four, dit-elle en allant se laver les mains. Est-ce que tu peux m’ouvrir une bière, s’il te plait ? Lui demanda-t-elle tout en coupant l’eau avant de s’essuyer les mains.

Comme leur diner serait composé de pizzas et de bières, pas besoin de sortir de verres et d’assiettes donc pas de vaisselles à faire ensuite. Il leur faudrait juste des serviettes en papier pour s’essuyer les mains. Elle avait juste oublié de prendre un petit quelque chose pour faire le dessert mais pour une fois, elle s’en passerait. Ceci dit, la jeune femme fit passer le café pour qu’il soit chaud quand ça serait le moment d’en boire.

- Te connaissant, tu as du oublier de faire des courses ! Elle ne lui jetterait pas la première pierre, elle-même avait tendance à acheter de minimum mais elle avait toujours une bricole pour les imprévus. Enfin, c’était des pizzas congelées mais ça dépannait quand on en avait  besoin. Et puis, j’avoue que je n’avais pas très envie de diner toute seule ce soir, reconnut la jeune femme. Et tu es la première personne qui me soit venue à l’esprit !

Enfin tout ça pour dire, qu’elle avait pensé à lui afin de ne pas diner toute seule. Qu’elle le connaissait assez pour savoir qu’il ne fallait pas venir les mains vides. Tout comme elle savait qu’il en aurait fait autant de son coté, s’il n’avait pas eu envie de diner seul et qu’il était venu chez elle.

- Tu m’as l’air bien fatigué, finit-elle par dire quand elle l’eut observé un peu plus attentivement. Tu vas bien ? Demanda-t-elle tout de même.

Avery entra, elle connaît cet appartement mieux autant que moi et peut-être même mieux que moi, sûrement parce que c'est une fille et qu'elle n'a pas de mal à savoir où sont les choses. Moi j'ai beaucoup de mal à retrouver mes affaires alors que je suis chez moi. Je ne suis pas un pro du rangement même si ce n'est pas bordélique au point qu'on pourrait penser qu'il y a eu la troisième guerre mondiale, non c'est rangé quand même, bien que je déteste ranger.

« Super, je commençais à avoir faim, tu as du lire dans mes pensées.»

Je lui ouvre une bière puis m'en ouvre une, et je lui tend la sienne. Je sors des serviettes et des verres à bière puis je pose le tout sur la table basse du salon. J'allume la radio pour avoir un fond sonore. Je n'aime pas beaucoup lorsque tout est silencieux. Elle me connaît vraiment bien depuis le temps. Je me souviens de notre rencontre, comment pourrais-je l'oublier? Je lui avais volé son sac et au final elle m'a aidé à m'intégrer dans un lycée, elle m'a aidée pour mes papiers et j'ai rencontré Nate juste après elle. Sans elle je crois que je serais encore dans la rue. Elle sait tout de moi jusqu'aux raisons qui m'ont poussées à fugué et à faire un si long voyage. Aux traitements que j'ai reçu dans mon lycée en Russie, à ce que me faisaient subir mes camarades et les professeurs. Je ne lui ai jamais rien caché, pas même la mort de mon père qui s'est fait tué pratiquement sous mes yeux. Elle sait tout de moi. C'est sans doute pour ça que je lui fait autant confiance par ce qu'elle m'a accepté alors que j'étais en difficulté et hors de la société. C'est une personne de cœur et je suis très fier de l'avoir comme amie alors l'entendre dire que je suis la première personne à qui elle a pensée ça me fait chaud au cœur et je lui souris content que je sois cette personne là.

« Je ravi que tu ai pensé à moi. Cette petite soirée improvisée est la bienvenue.»

Je lève la bouteille de verre comme pour la saluer et la remercier, pour lui porter en quelque sorte un toast. J'acquiesce lorsqu'elle me dit que j'ai l'air fatigué, je dois dormir cinq ou six heures par nuit avec tout ces dossiers. Je crois qu'il me faudrait une assistante ou un assistant pour ne plus être autant débordé.

« Tu n'imagine pas à quel point, à croire que tout le monde aime se faire des procès, c'est dingue. Je ne pensais pas avoir autant de travail en commençant. Demain j'ai encore rendez-vous au tribunal à huit heures pétante et j'ai encore pleins d'arguments à trouver pour aider mon client mais rassure-toi je vais bien et j'aime toujours autant ce que je fais, c'est grâce à toi si j'en suis arrivé là. »

Je lui fais un clin d’œil, c'est vraiment grâce à elle parce que j'ai pu suivre des études de droits et devenir un citoyen britannique et j'en suis très fier.

Ce n’était pas qu’elle connaissait l’appartement de Niko mieux que lui, c’était tout simplement parce qu’elle était observatrice et qu’elle avait enregistré où se trouvait les choses. Et le fait de venir chez lui assez souvent avait fait qu’elle n’avait plus besoin de demander pour trouver ce dont elle avait besoin. Surtout que d’ordinaire, elle ne venait pas avec les pizzas mais avec quelques courses pour cuisiner chez lui. Toutefois ce soir-là, la jeune femme n’avait pas envie de faire la popote ni envie de passer la soirée toute seule. Le célibat avait des avantages parce qu’on n’avait pas de compte à rendre à quiconque, pourtant parfois c’était pesant quand on se retrouvait seule chez soi.

Avery sourit à son ami quand il lui dit qu’elle avait dû lire dans ses pensées. L’idée était tentante à vrai dire – comme ça, elle pourrait apprendre à jurer comme un camionneur en russe – mais elle ne saurait dire si elle oserait le faire, si elle avait eu un tel pouvoir. Non, elle ne l’aurait pas fait parce qu’il avait besoin de son intimité et parce qu’elle savait qu’il lui faisait confiance pour lui parler librement, s’il en avait besoin. Ceci dit, elle n’avait pas besoin de ce genre de pouvoir pour savoir qu’il oubliait de faire les courses à bosser comme il le faisait. Qu’il préférait s’arrêter dans un resto, un fast-food, ou encore de se faire livrer à domicile pour manger.

- Niko, je te connais tout simplement ! Se contenta-t-elle de dire en prenant sa boisson. Merci !

Elle pourrait presque mettre sa main au feu sur le fait qu’il avait mangé soit sur le pouce soit qu’il avait oublié de déjeuner à peaufiner des dossiers. Oui, presque parce qu’elle en avait besoin pour manger ainsi que pour son travail.

Avery le suivit dans le salon et s’installa sur le sol, en tailleur. Pendant ce temps-là, le jeune homme alluma la radio pour avoir un bruit de fond. Elle se surprit à sourire, à repenser au passé. A l’époque du lycée plus exactement. La jeune femme avait la mauvaise habitude d’allumer sa chaine hi-fi pour faire ses devoirs, quand ça n’était pas la télévision. D’ailleurs ce fut à cette époque qu’elle fit la rencontre du jeune homme. Ni l’un ni l’autre ne pourrait l’oublier, Nikolaï lui avait dérobé son sac quant à elle, elle lui avait couru après en l’incendiant et lui disant qu’il finirait dans une cellule du commissariat le plus proche. Pourtant, elle s’était ravisée quand elle avait compris qu’il ne l’avait fait que pour survivre. L’infirmière lui avait tendue la main, en le ramenant chez elle pour qu’il puisse manger, prendre une bonne douche et avoir un toit sur la tête. Ensuite, elle lui avait permis de pouvoir suivre les cours de son lycée, l’aider à rattraper son retard. Elle avait également mis son père à contribution pour qu’il obtienne des papiers anglais, mais aussi pour tout ce qui était juridique. Quant à Niko, il s’était confié à elle petit bout par petit bout quand il eut pleinement confiance en elle. Voilà, pourquoi elle était ici ce soir. Il avait été la première personne à qui elle avait pensé et qu’elle avait besoin de savoir qu’il se portait bien, que tout allait bien pour lui.

Elle écouta attentivement l’explication qu’il lui donna sur le fait qu’il avait l’air fatigué. Avery avait donc vu juste, il passait beaucoup trop de temps à son cabinet le nez dans ses dossiers. Mais bon, on ne pourrait pas le lui enlever parce que ça faisait partie de sa personne.

- Les séries télévisées donnent de mauvaises idées aux gens, dit-elle, parce qu’il fallait reconnaitre que ce n’était pas foncièrement faux. Il suffisait juste de regarder « Les feux de l’amour », et le nombre de divorce de Victor Newman puis de mariage ou de remariage avec Nikki, Ashley et toutes les autres.

Un sourire se dessina sur ses lèvres quand il dit à haute voix que c’était grâce à elle, s’il en était là. Oui et non. Oui, parce qu’elle lui avait donné une chance de devenir quelqu’un de bien, de devenir un citoyen anglais. Et non, parce que c’était seulement grâce à son travail qu’il était devenu avocat, qu’il avait une place dans un cabinet.

Non plus sérieusement, je pense qu’il vaut mieux divorcer avant de trop se déchirer et que ce soit les enfants qui en pâtissent. Comme de prendre en compte l’intérêt des enfants plutôt que de savoir qui va avoir le 4/4 ou la télévision dernier cri. Et elle parlait en connaissance de cause. Des fois, tu devrais entendre certains parents s’engueuler devant leur gosse, mais elle ne lui dit pas qu’ils faisaient parfois appel à la sécurité pour les faire sortir de l’hôpital afin de ne pas perturber l’enfant. Enfin bref, on ne va pas commencer à parler boulot quand même ! Elle fit mine de chercher un nouveau sujet de conversation, tout en prenant un morceau de pizza. Niko, tu me vois plus avec des poissons rouges ou un chat ?

Elle lui demandait parce qu’il la connaissait sur le bout des doigts. Et comme ça faisait un moment qu’elle songeait à prendre un animal de compagnie – et plus exactement un chat -, elle voulait savoir ce qu’il pensait de cette idée. Surtout, qu’elle serait capable de le trainer à l’animalerie ou à la SPA pour l’aider à choisir.